« …Je m'étonne que les quelques rares voyageurs qui ont déjà parlé de ce pays, de ces villages et de ces cases, n'aient cru devoir signaler que leur "étrangeté". La case des Massa ne ressemble à aucune autre, il est vrai ; mais elle n'est pas seulement "étrange". Elle est belle : et ce n'est pas tant son étrangeté que sa beauté, qui m'émeut. Une beauté si parfaite, si accomplie, qu'elle paraît toute naturelle. Nul ornement, nulle surcharge. Sa pure ligne courbe, qui ne s'interrompt point de la base au faîte, est comme mathématiquement ou fatalement obtenue ; on y suppute intuitivement la résistance exacte de la matière…»
C’est ici Gide qui parle et l’objet de ce déployement d’éloges, l’habitat traditionnel des Musgum. S’il dit « obus, » c’est que les premiers occidentaux à découvrir ce fleuron de l’architecture négro-africaine étaient soldats et que sa forme si particulière leur évoqua naturellement cette référence militaire. Mais les Musgum, -cette population du centre africain que le hasard d’un certain tracé de Berlin, moins attentif aux spécificités culturelles qu’au cours du Logone, a jeté des deux côtés de la frontière entre le Tchad et le Cameroun-, eux mêmes disent « Toleukakay.» Modeste peuple d’éleveurs et de pêcheurs...
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Marc Allégret, photos du 'Voyage au Congo' avec André Gide (1927)